Voilà déjà deux semaines que le Lardon a fait sa première rentrée ! Comme pour tous les enfants scolarisés, cette nouvelle étape de sa vie est venue avec ses nouveaux codes et des temps forts, dont ceux spécifiques à la cour de récréation.
Et (comme la plupart des parents, j’imagine), j’aimerais beaucoup pouvoir me transformer en petite souris pour observer comment cela se passe ! D’abord parce qu’il s’agit finalement de sa première expérience en collectivité ; mais aussi parce que la cour de récréation est un sujet régulièrement abordé pour qui s’intéresse à la sociologie de l’enfant et au féminisme (moi par exemple) : c’est dans cet espace que commence à s’installer les inégalités entre garçons et filles, et qui continueront jusqu’à l’âge adulte…
Les filles sont restreintes en espace
Je l’ai moi-même vécu dans mon enfance en tant que fille : pendant les récréations, les filles sont confinés dans des petits espaces pendant que les garçons profitent de la majeure superficie de la cour.
Ce phénomène est d’ailleurs très bien montré dans le documentaire d’Eléonor Gilbert, Espace (visible en entier ici) : une petite fille explique la géographie de sa cour d’école : « Je vais montrer les endroits où on ne peut pas jouer » dit la petite fille « Enfin les filles, parce que les garçons eux, ils ont le droit de jouer au foot. » complète-t-elle factuellement. Et la voilà qui hachure le terrain de foot, le terrain de basket, le terrain de balle au prisonnier, les buissons, les portes et les toilettes : bientôt, il ne reste presque plus aucun endroit où les filles ont « le droit » de jouer.
Dans l’épisode Cours d’égalité à la récré de France Culture, la géographe Edith Maruéjouls fait les mêmes constats : la cour d’école est l’un des premiers espaces collectifs auxquels les enfants sont confrontés, et les dynamiques qui s’y installent les marquent pour leur futur. Ainsi, ne pas pouvoir jouer à ce qu’on veut, parce qu’on est une fille (ou un garçon pas assez conforme) est l’une des premières expériences d’inégalités que des enfants peuvent être confrontés.
Et ce qui commence à l’école continue plus tard : très vite, les filles et les femmes n’ont plus leur place dans l’espace public. « C’est trop dangereux, surtout la nuit » dira-t-on par exemple, pour confiner les femmes chez elles.
Les mécanismes menant à cette injustice sont les mêmes que ceux que l’ont retrouve dans le monde du travail : en effet, dans la théorie aucun règlement n’interdit aux filles de jouer dans la cour (tout comme aucun règlement n’interdit aux femmes d’occuper des postes à responsabilités) mais dans la pratique, ce phénomène est pourtant étudié dans la majorité des cours de récréations (dans le monde du travail, on appelle ça le plafond de verre)…
Mixer les genres dans les cours de récréation
Heureusement, il existe pleins de solutions pour inciter les garçons et les filles à jouer ensemble sur tout l’espace disponible et des stratégies ont déjà mises en place dans de nombreuses villes, avec ou sans modification de la cour de récréation.
À Trappes par exemple, pour en finir avec des cours de récréation sexistes, où les filles n’existent qu’à la marge, la géographie de la cour de récréation a été revue :
- Avec moins de bitume mais plus de plantes, d’arbres, et revêtements souples ;
- Et surtout, des espaces conçus pour le jeu libre et pas pour une activité unique (le foot pour ne pas le citer).
Mais même sans travaux, il est possible d’arriver à de chouettes résultats. Dans les écoles où Edith Maruéjouls est intervenue (l’École élémentaire du Peyrouat, à Mont-de-Marsan par exemple), plusieurs initiatives ont été mises en place :
- Des récréations sans ballon de foot : les enfants réinvestissent alors leur temps libre différemment, cela favorisant souvent les jeux mixtes ;
- Des récréation où les adultes jouent avec les enfants : les enfants les plus effacés savent qu’ils seront protégés grâce à la présence de l’enseignant, et sont donc davantage enclins à participer au jeu collectif ;
- Des jeux mis à la disposition des enfants : d’autres jeux que le foot sont alors possible, notamment des jeux coopératifs.
Le point livre
On ne serait pas vraiment sur mon blog si après avoir énoncé un problème, je n’évoquais pas des livres pour le résoudre ! Comme personnellement, « on y est pas encore » (après 2 semaines de maternelle, je ne sais pas grand chose des journées du Lardon, mais je sais qu’il joue avec des petites filles, et pas que au foot, ouf !), je n’ai lu encore aucun de ces livres mais comme cette sélection est sponsorisée par la fabuleuse Fille d’album, elle ne peut que être chouette :
Et vous, quels souvenirs avez-vous de la récréation ? Pour vos (grands) enfants scolarisés, comment ça se passe ?
Ah mais c’est très intéressant, je ne regarderais plus les cours de récré pareil.
Moi je me souviens d’avoir été choquée en laissant mon tout petit bébé (…) à la maternelle de la violence des petits garçons dans la cours. Y en a un qui avait mis un camarade à terre et le rouait de coup de pied et de poing…pas sur que ça soit vraiemnt jouer à la bagarre ça?
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Oh la la ça doit être horrible à voir ! Ici l’école est en travaux et la cour est minuscule donc pour le moment, c’est 2 classes à la fois seulement… Et c’est déjà dur pour certains PS de se retrouver « seuls » au milieu d’autres enfants alors je n’imagine même pas dans ton cas !
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Plus je lisais ton article, plus je trouvais le sujet abordé vraiment intéressant ! C’est incroyable comme constat. Et en même temps, je me souviens bien de mes temps de récréation en primaire. Les garçons au foot. Les filles dans des « coins ». C’est super intéressant en tous cas de se questionner à ce sujet. Je n’avais jamais vu les choses sous cet angle !
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Je dois etre chanceuse, je ne sais pas ce qu’il en ai dans la cours du primaire, mais celle de la maternelle est scindée en deux parties : une pelouse et un bitume, et sur le bitume, il y a cabane, marelle et espace pour les vélos. Pas de jeux de ballon, donc tout est assez mixte 🤗
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Ici l’école est minuscule (4 classes de la TPS au CM2). La classe de TPS/PS/MS a sa cour de récréation privative, et la maîtresse leur sort des vélos, des ballons… et il y a une structure en dur avec toboggan. Je ne sais pas si c’est du a leur âge mais clairement on ne voit aucune différence garçons/filles (en tous cas pour le moment, c’est peut-être juste qu’on est encore trop proche du début de l’année!).
Mon asticot rigolo a retrouvé une grosse partie des copains/copines de la crèche et d’après lui la seule qui va aussi vite que lui sur le vélo c’est Manon 🙂
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